
Les références à une citoyenneté de la science deviennent nombreuses et légitimes.
Nous avons déjà touché du doigt le rapport entre l’aspect universitaire, formé, encadré, auto-contrôlé et la nécessité d’une ouverture pour bousculer le paradigme (voir article Conceptions du monde et écoles scientifiques).
Nous avons aussi dans l’article précédent approché le concept du beau par rapport à la démarche en science.
Il reste à évoquer un triple aspect qui se centre sur une idée essentielle du développement de l’humanité : la liberté [1]. Ces trois aspects sont :
- moyens de contrôles du citoyen sur l’éthique scientifique,
- moyens financiers des laboratoires indépendants,
- orientation des recherches.
1. Moyen de contrôle du citoyen sur l’éthique scientifique
Les populations, et par extension l’humanité, sont au premier plan du développement de la science dès lors qu’elle devient technique, industrielle ou autre c’est-à-dire dès qu’elle sort du labo. Mais avant de sortir du laboratoire et d’être révélé au grand jour elle mobilise de façon fondamentale des gens qui ne peuvent encore pas forcément partager leur travail ? Quid alors de l’inutilité de recherches qui seront mal reçues d’un public généralement mal informé ?…
Le premier moyen de contrôle est donc le chercheur lui-même. Soit il travaille sur un phénomène (radioactivité par exemple pour les Curie) en ignorant totalement où il va être conduit, soit il développe des « produits » nouveaux sur la base de conclusions fondamentales (ogm sur la base de la possibilité de manipulation des cellules vivantes) et dans ce cas il doit des comptes avant d’avancer sur son propre travail pour que l’ambition personnel (voire lobbyiste) soit mise au rancard.
2. Moyens financiers des laboratoires
On en a déjà un peu parlé dans l’article mentionné plus haut. Mais il faut bien comprendre que si les universités sont richement alimentées par les impôts, les petits laboratoires doivent se débrouiller pour trouver des mécènes. Quid alors d’une recherche ouverte, variée ?
Comment trouver, à l’heure où les grandes sociétés aident assez volontiers les ONG humanitaires ou les actions tournées vers la biodiversité, un intérêt pour un sujet fondamental sans perspective de retour à court terme, ne serait-ce que l’image de marque ?
Comment trouver la bonne porte où l’on peut dire comme nous à l’association scIence : « Voilà, on tient un sujet captivant sur lequel on bosse bénévolement depuis 30 ans et pour lequel nous avons besoin d’accélérer notre recherche, apparemment prometteuse ? On vous en dira plus si vous êtes intéressé et que vous voulez bien nous rencontrer. »
Comment faire sérieux, dans le monde du libre c’est-à-dire sans l’étiquette « université », sans pour autant brader sur la place publique, la petite idée qu’on soigne depuis si longtemps ?…
3. Orientation des recherches
Au point 1 nous avons parlé « éthique » de la part des équipes de recherches. Ici il s’agit davantage de parler attente, aspiration de la part du public, de la part des populations, de la part de l’humanité.
Les orientations choisies en recherche
déterminent les sociétés jusqu’à l’avenir de l’humanité !
Ce n’est pas un scoop, c’est une phrase à méditer… et il ne faut pas longtemps dans son âme et conscience, dans un esprit de désintérêt personnel pour saisir le drame de notre confiance en la science et de notre inculture dans le domaine de la connaissance du monde (anciennement sciences naturelles [2]).
Mot de la fin
Le monde d’aujourd’hui gagnerait beaucoup à écouter ceux qui cherchent par conviction hors institutionnalisation…
Nous sommes là.
Tu sens notre poids ?
Tu sens que nous pesons plus que les autres ?
Il sont là, les hommes qui voient les deux côtés de l’arbre et l’intérieur de la pierre
(…)
Ils sont là, ceux qui ont sauté la barrière.
Jean Giono (Le Serpent d’étoiles, paroles du berger à la Terre)
A+, tout le monde !
Patrick R.
Notes
[1] Il est difficile de parler de la liberté en quelques mots. Disons ici que la liberté n’est pas au sens de chacun fait ce qui lui plaît et voit ce qu’il veut voir comme il en a envie. La liberté est contraignante par le seul fait que le chemin vers la vérité s’y impose de lui-même : je ne peux me mentir à moi-même si je veux être libre. C’est tout… Autant dire que je suis libre dans mon acte de penser mais pas au-delà, le monde étant cohérent il impose des lois de cohérence qui font de lui UN (ou LE) monde.
[2] Voir wiki science de la nature. C’est drôle : il est mentionné que 1958 est l’année d’institutionnalisation d’une dichotomie au sein des sciences de la nature où l’on sépare les science de la terre (espace considéré comme purement physique) et les sciences biologiques qui touchent l’espace du vivant !!! (l’un se passerait-il de l’autre ?… (1958 est mon année de naissance, je comprends ainsi mieux certaines choses concernant mon point de vue…)